RÉSISTIBLE ASCENSION

On aura beaucoup parlé après le choc du premier tour de l’élection présidentielle sur les causes d’un résultat qui fait honte au pays qui célébrait en juillet 98 l’équipe de France de Zidane, Desailly et les autres. Mais il est un contributeur au vote Lepéniste dont il a été peu question, c’est le patronat… Bien sûr, ses figures de proue ne mettent pas les mains dans ce cambouis-là, mais … Quelle différence au fond y-a-t-il entre le culte des meilleurs, de la performance, et de la sélection qu’ils mettent en avant depuis plusieurs années, leur critique de " l’assistanat " et leur mépris des faibles et des improductifs, quelle différence donc avec les plus ignobles thèses de l’extrême droite et de son chef, de leur culte des forts, de la supériorité de la race, de l’élimination des faibles par la sélection naturelle? Comment l’extrême richesse affichée, et revendiquée, à la barbe des " petits " ne pourrait-elle avoir de conséquences? En comparant leur SMIC parfois amputé par le temps partiel avec les salaires astronomiques, les augmentations vertigineuses, n’y a-t-il pas de quoi souffrir quelque rancœur? Comment les attaques permanentes du patronat contre les acquis sociaux, les 35 heures, la sécurité sociale, les retraites et l’emploi pourraient ne pas engendrer de la peur? Au cours du second semestre 2001 et du 1er trimestre 2002, le nombre de licenciements économiques est passé de 15000 à 25000 PAR MOIS .. retrouvant le niveau de 97 ! Que dire des provocations de Kessler sur la sécurité sociale, du mépris ouvertement militant du Baron Ernest pour la politique, c’est-à-dire la démocratie? Que dire de la pression feutrée du club des grands patrons (dont le nôtre), l’APEF, dont on apprend aujourd’hui qu’il préconise rien moins que la démolition du code du travail… encore un sujet de convergence avec Le Pen d’ailleurs ! La responsabilité des grands patrons n’est pas mince dans l’injustice sociale dont l’extrême droite s’est saisie pour la détourner à son profit électoral. Nous savons bien qu’il s’agit d’un détournement et que l’extrême droite n’a jamais été " socialement de gauche ". La suppression de l’impôt sur le revenu favoriserait les revenus élevés… et rejoindrait d’ailleurs en cela la volonté de la droite de réduire les plus hautes tranches d’imposition tout autant que la suppression de l’impôt sur la fortune auquel est assujetti Le Pen. La suppression des cotisations sociales n’arrangerait certainement pas le sort de la sécurité sociale et ne remplirait pas non plus les poches des salariés…une sécu qui aurait d’ailleurs aussi à souffrir de la perte des cotisations de l’immigration qui cotise plus qu’elle ne reçoit, tandis que son déséquilibre d’aujourd’hui vient des régimes couvrant le gros des soutiens lepénistes, artisans, commerçants notamment. Nous n’aurons donc pas d’état d’âme à suivre l’appel du bureau confédéral de la CGT, à l’instar d’autres confédérations, à faire barrage à l’extrême droite et à démontrer que dans sa très grande majorité le peuple français n’en veut pas… ce qui ne peut se faire autrement qu’en votant pour le seul autre candidat en lice au deuxième tour, Jacques CHIRAC. Disons au passage que Ponce Pilate en s’abstenant contribuera à augmenter le pourcentage de Le Pen.